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Le gouvernement décide la dissolution de la Ligue communiste et d'Ordre nouveau

M. Raymond Marcellin, ministre de l'intérieur, a fait approuver par le conseil des ministres du 28 juin la dissolution de la Ligue communiste et d'Ordre nouveau. Dès le samedi 23 juin, le ministre de l'intérieur avait proposé ces dissolutions au président de la République et au premier ministre, en raison des violents incidents qui s'étaient déroulés le jeudi 21 juin à Paris, mais l'intervention obligatoire du conseil des ministres en cette matière a retardé la mise en application des mesures. Le gouvernement a, en outre, demandé au parquet près la Cour de sûreté de l'État de poursuivre les dirigeants des deux organisations.

Le Monde

Publié le 29 juin 1973 à 00h00, modifié le 29 juin 1973 à 00h00

 

Les deux décisions se fondent sur les motifs suivants :

 

• Pour Ordre nouveau :

" La réunion publique du 21 juin organisée par Ordre Nouveau était protégée à l'intérieur de la salle de la Mutualité par deux cents militants environ en tenue de combat, armés et casqués.

" La perquisition effectuée le 22 juin au siège social d'Ordre nouveau, 8, rue des Lombards, Paris-8", a permis d'y découvrir de nombreuses armes par destination et, notamment, 24 manches de pioches, 41 barres de fer et 31 perches de bambou effilé.

" Une précédente perquisition effectuée dans les locaux d'Ordre nouveau, le 2 mars 1971, à la suite d'affrontements violents avec des contre-manifestants lors d'une réunion publique tenue au Palais des Sports de Paris le 1er mars 1971, avait permis à la police judiciaire de saisir plus d'une tonne d'armes par destination entreposées au siège social de cette association.

" Depuis le 1er janvier 1973, Ordre nouveau et ses adhérents sont responsables d'une douzaine de manifestations violentes ou d'actions à force ouverte sur l'ensemble du territoire national.

" Cette organisation entretient des relations étroites avec des partis néo-fascistes ou néo-nazis étrangers. Ces relations ne laissent aucun doute sur le but que les dirigeants d'Ordre nouveau poursuivent.

" De tels agissements tombent incontestablement sous le coup de la loi du 10 janvier 1936 sur les groupes de combat et les milices privées, et notamment de son article premier.

Dans ces conditions, il apparaît nécessaire de procéder à la dissolution de l'association Ordre nouveau. "

 

• Pour la Ligue communiste :

" La Ligue communiste, par voie de tracts et d'affiches, a appelé à manifester contre une réunion publique qui se tenait à la Mutualité le 21 juin dernier à 21 h. Les militants de ce groupement se sont rassemblés en groupes de combat organisés. Les chefs de chacun de ces groupes portaient des signes distinctifs. Tous les participants étaient casqués et armés de barres de fer, de matraques et d'engins explosifs. Ils étaient approvisionnés en projectiles de toute sorte. Ils disposaient de véhicules pour transporter ces armes. Refusant d'obéir aux ordres de dispersion, ils ont violemment attaqué les forces de police. Deux cars de police qui transportaient, l'un un malade, l'autre un blessé, ont été incendiés par ces groupes de combat et les policiers grièvement brûlés.

" Au cours des affrontements, 71 policiers ont été blessés dont 11 gravement. "

" Le 22 juin au matin, une perquisition a été opérée par la police judiciaire au siège de la Ligue communiste, 7, impasse Guéménée à Paris-4e. Elle a permis de découvrir deux fusils de guerre, dont l'un équipé d'une lunette de visée, des munitions, une grenade offensive, vingt cocktails Molotov, plus d'une centaine de matraques et de barres de fer, une vingtaine de casques, des appareils radio émetteurs-récepteurs portatifs, des porte-voix et des mégaphones.

" Depuis le 1er janvier 1973, la Ligue communiste et ses militants sont responsables d'une vingtaine de manifestations violentes sur l'ensemble du territoire national.

" La Ligue communiste n'hésite pas, d'ailleurs, à revendiquer la responsabilité de ces manifestations armées.

" Le numéro 149 de " Rouge ", en date du 18 mars 1972, écrivait :

" Ainsi, lors de la provocation fasciste du 9 mars 1971, des organisations révolutionnaires ont " pris le risque de convoquer et d'encadrer une manifestation armée; lorsque la Ligue communiste a organisé, à l'occasion des élections fantoches à Saigon, l'attaque du consulat américain de Paris, un certain nombre de risques calculés ont été pris, mais sur la base d'une analyse précise et correcte des conditions politiques qui rendaient ces actions réalisables... "

L'ensemble de ces éléments démontre que la Ligue communiste tombe sous le coup de la loi du 10 janvier 1936 sur les groupements de combats et les milices privées et notamment son article premier.

" Dans ces conditions, il apparaît nécessaire de procéder à la dissolution de la Ligue communiste. "

Le Monde

 


https://www.lemonde.fr/archives/article/1973/06/29/le-gouvernement-decide-la-dissolution-de-la-ligue-communiste-et-d-ordre-nouveau_2553205_1819218.html