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Au Brésil, Uber en guerre contre une start-up qui aide les chauffeurs à mieux gagner leur vie

Un procès intenté par Uber contre l’application StopClub, qui permet aux chauffeurs de ne choisir que des courses rentables, relance le débat sur l’ubérisation au Brésil. Le magazine “Revista Piauí” revient sur cette querelle judiciaire, qui oppose deux amis d’enfance à la multinationale américaine.

Publié le 16 septembre 2023

Lors d’une grève de chauffeurs Uber à São Paulo, le 8 mai 2019. Photo Nacho Doce/REUTERS

Cest un peu David contre Goliath. D’un côté, la multinationale américaine Uber – qui compte aujourd’hui 1 million de conducteurs et 30 millions de passagers au Brésil. De l’autre, Pedro Inada et Luiz Neves, deux amis d’enfance à l’origine de la start-up StopClub, créée en 2017 à Rio de Janeiro pour “aider les milliers de chauffeurs Uber brésiliens à mieux gagner leur vie”, raconte Revista Piauí.

Leur succès leur a valu d’être attaqués en justice par Uber en juillet. En effet, l’application StopClub est devenue ces derniers mois une véritable star au Brésil, comptant plus de 530 000 utilisateurs.

Au départ, les “stop club” étaient des “points de ravitaillement” visant à “briser la solitude des conducteurs”, explique le magazine de gauche. Mais lorsque ceux-ci ont dû fermer pendant la pandémie, les deux entrepreneurs ont transféré leur affaire en ligne, avec diverses ressources au service des chauffeurs. En mars, StopClub a ainsi développé son outil phare, “pour calculer les gains réels des courses et refuser automatiquement celles qui ne sont pas rentables”. Une donnée invisible sur l’interface Uber, “qui ne fournit que le montant brut, sans plus de détails”.

“Y voir plus clair”

Jugeant “excessive” la marge bénéficiaire prélevée par Uber – “qui peut atteindre jusqu’à 40 % de la valeur d’un trajet” –, les chauffeurs ont rapidement adopté cette fonctionnalité, qui leur permet d’y “voir plus clair” et d’“augmenter considérablement leur rémunération”. Une aubaine pour ces conducteurs qui travaillent en moyenne trois heures de plus que leurs concitoyens tout en gagnant 600 reais (112 euros) de moins que le salaire moyen, et qui manifestaient en mai pour une meilleure rémunération. “C’est pour ça qu’Uber a été contrarié, au point de faire interdire l’utilisation de l’application par les tribunaux”, déplore Marcelo Tavares, un chauffeur de São Paulo.

En effet, “les avocats d’Uber sont passés à l’attaque”, poursuit le magazine, et se sont vu dans un premier temps “accorder une injonction obligeant la startup à suspendre les fonctions de calcul des gains et de refus automatique”, qui “pouvaient accroître le mécontentement des passagers à l’égard d’Uber”, selon le juge de la cour de justice de São Paulo.

Une accusation que le cofondateur Luiz Neves rejette :

“Les prix doivent être justes pour que les chauffeurs acceptent les courses. Et si les passagers doivent payer plus cher, c’est parce qu’Uber ne veut pas réduire sa part des bénéfices. Ce procès n’est pas contre StopClub, mais contre le droit des travailleurs à s’organiser pour exiger de meilleures conditions de travail.”

Sur fond de “lutte des classes”, selon le magazine, la “guerre” judiciaire est déclarée. Et elle tourne pour l’heure à l’avantage du plus petit. Après un recours, les deux entrepreneurs cariocas ont réussi à faire annuler l’injonction le 22 août. Cependant, l’avocat d’Uber “promet de faire appel”.

 

Courrier international